Le château de Gaillon
Le château de Gaillon est construit sur un éperon qui domine la Seine sur le territoire de la commune de Gaillon dans le département de l’Eure en région Normandie. De place forte stratégique médiévale, il est devenu successivement le premier château Renaissance de France, une carrière de pierre, une maison centrale carcérale, une garnison et enfin un asile d’aliéné puis un centre correctionnel dans ses Jardins Hauts avant d’être restauré depuis 1977. 🔗 L’Agglo Seine-Eure s’est engagée à poursuivre sa restauration pour en faire un centre touristique ouvert aux rencontres culturelles et aux séminaires.
Le château fait l’objet d’une protection totale au titre des monuments historiques. C’est l’appropriation du château à des fins punitives qui a permis de sauver le bâti d’une destruction complète. De nombreux graffitis relevés et conservés témoignent de cette occupation.
La ferme « Les Légumes du Château » cultive aujourd’hui les Jardins Bas du Château et contribue à la sauvegarde de leur tradition maraîchère.
Une forteresse médiévale disputée entre les rois de France et d’Angleterre
1179 | Philippe Auguste devient héritier de la couronne de France |
1183 | Richard Cœur de Lion devient héritier de la couronne d’Angleterre mais aussi de la Normandie. |
1192 | A son retour de croisade, Richard Cœur de Lion est capturé par le duc d’Autriche Léopold V et remis entre les mains de l’empereur germanique Henri VI. Gaillon est à cette époque une forteresse-frontière entre la France et la Normandie. Philippe Auguste profite de la captivité de Richard pour entamer la conquête de la Normandie et pour s’emparer de la forteresse médiévale de Gaillon commandée par le châtelain Geoffroy de Braket. La défense du château est confiée au mercenaire Lambert Cadoc. |
1194 | Richard Cœur de Lion est libéré et accoure en Normandie pour reprendre les places dont Philippe Auguste s’était emparé. Une trêve est conclue entre les belligérants et adjuge le château de Gaillon à la couronne de France. |
1195 | Le « traité de Gaillon » confirme la cession du château à la couronne de France. |
1196 | Richard Cœur de Lion ne renonce pas et vient assiéger sans succès le château. Il est blessé et le siège est levé. |
1199 | Richard Cœur de Lion est atteint par un carreau d’arbalète pendant le siège d’un château du Limousin et meurt de ses blessures. Son frère Jean sans Terre lui succède à la couronne d’Angleterre. |
1200 | Par le « traité du Goulet» signé par Jean sans Terre, le château entre définitivement dans le domaine royal de la couronne de France. |
1220 | Philippe Auguste dépossède Lambert Cadoc du château de Gaillon et l’emprisonne. |
1223 | Philippe Auguste meurt sur la Seine, où il naviguait pour rejoindre Mantes depuis son château de Pacy-sur-Eure. |
1226 | Saint Louis devient héritier de la couronne de France |
1262 | Saint Louis donne le château de Gaillon à l’archevêque franciscain de Rouen, Eudes Rigaud. L’archevêché de Rouen gardera la possession du château jusqu’à la Révolution française. |
1266 | Eudes Rigaud part en croisade après avoir lancé la reconstruction du château très délabré. |
1270 | Saint Louis meurt à Tunis au court de la croisade. |
1275 | Eudes Rigaud meurt à Rouen. Après sa mort les archevêques de Rouen se succèderont et continueront les travaux d’entretien et d’aménagement. |
1419 | Le manoir ainsi fortifié et aménagé redevient le théâtre de la guerre entre la France et l’Angleterre. Le Duc de Clarence reprends le château pour la couronne d’Angleterre. Les Français reprennent vite la forteresse. |
1423 | Le Duc de Bedford s’empare le la place pour la couronne d’Angleterre et demande la destruction de toutes les fortifications. |
1424 | Jean de la Roche, archevêque de Rouen, obtient la préservation de la partie habitable du château. A partir de cette date les Anglais ne respectent plus les droits seigneuriaux de l’archevêque et la misère s’installe à Gaillon. |
1438 | Les terres sont en friche, les habitants n’ont plus de quoi manger et doivent fuir. |
1450 | La France reprend la Normandie et la guerre de Cent Ans se termine dans cette région. |
1453 | Guillaume d’Estouteville devient archevêque de Rouen et commence la réfection du château en ruine . |
Sceau de Lambert Cadoc au XIIIe siècle
Le premier château Renaissance de France
1492 | Georges d’Amboise devient archevêque de Rouen. Rouen est alors une ville riche et dynamique, la deuxième de France après Paris. |
1498 | Louis XII accède au trône de France. Georges d’Amboise devient son principal conseiller. |
1502 | Émerveillé par l’art et l’architecture en Italie, Georges d’Amboise choisit Gaillon pour réaliser son « palais italien ». Il fait appel à des constructeurs du Val de Loire pour le début de la première tranche de travaux d’une somptueuse demeure. |
1506 | Georges d’Amboise fait appel à de nombreux artistes italien et rouennais pour le début de la deuxième tranche de travaux. Dom Pacello da Mercogliano dit Pierre de Mercollienne, alors jardinier du roi et grand artisan des jardins Renaissance de France commence à créer les jardins du château. |
1508 | Visite royale de Louis XII et Anne de Bretagne au château de Gaillon. Dans une lettre écrite par un envoyé du duc italien de Ferrare, le château de Gaillon est désigné comme « le plus beau et le plus superbe lieu qu’il y ait dans toute la France ». |
1510 | Georges d’Amboise meurt à Lyon. |
1513 | Georges II d’Amboise devient archevêque de Rouen. Il continue l’œuvre de son oncle en terminant la chapelle. |
1591 | Jacques Nicolas Colbert devient archevêque de Rouen. Il fera construire construire par Jules Hardouin-Mansart le pavillon Colbert, une orangerie de style classique. Le jardinier André Le Nôtre réaménage les jardins du château. |
Georges Ier d’Amboise (1460-1510)
Le château devient une carrière de pierres
1789 | A la Révolution française, un décret met les biens de l’église à disposition de la nation. |
1790 | Les biens nationaux du clergé sont vendus pour résoudre la crise financière qui a causé la Révolution. |
1792 | Le citoyen Darcy se porte acquéreur du château et en disperse les trésors. Le château servira alors de carrière de pierre et sera livré au pillage. |
1801 | Alexandre Lenoir sauve des morceaux entiers du château pour enrichir son « musée des Monuments Français » où est alors préservé une partie du patrimoine architectural après les destructions post révolutionnaires. |
Alexandre Lenoir (1761 – 1839)
Le château devient une maison carcérale ou une garnison
1812 | Un décret du 3 janvier 1812 entérine la proposition du préfet de l’Eure Barthélémy François Rolland de Chambaudoin pour transformer les ruines du château de Gaillon en maison centrale régionale. La dépouille de pierres devient propriété de l’État. Les architectes Louis-Ambroise Dubut puis Louis-Robert Goust sont appelés pour transformer le château en centre pénitentiaire. |
1816 | La maison centrale est inaugurée par transfert de condamnés détenus à Rouen alors que l’appropriation des locaux est loin d’être achevée. |
1817 | Un premier atelier de tissage est aménagé en juillet 1817 dans une cave du château. La principale fonction d’une maison centrale de détention étant de « vouer le crime à l’industrie », les ateliers ne cesseront de se diversifier : chaussons, chaises, tapis, peausserie, brosserie, cordonnerie… |
1820 | Un quartier des femmes est aménagé et pour la première fois dans une maison centrale, un quartier correctionnel dédié aux mineurs, adossé au quartier réservé aux femmes est aussi aménagé. |
1824 | Les travaux d’aménagement de la maison centrale prennent fin. |
1840 | La centrale accueille plus d’une centaine de jeunes délinquants hommes, femmes et enfants originaires de Paris et sa banlieue ainsi que de Rouen. La centrale devient l’un des plus grands centres de détention de France. |
1845 | La décision est prise de construire un nouveau bâtiment exclusivement dédié aux mineurs, en dehors du château dans les Jardins Hauts. |
1849 | Le quartier des femmes est fermé pour pouvoir accueillir plus de condamnés. |
1859 | Le quartier des mineurs est officiellement fermé mais quelques mineurs continueront à être accueillis. |
1862 | Le quartier industriel des mineurs ferme officiellement ses portes en mars 1862. |
1901 | La maison carcérale est fermée. |
1902 | Début de l’occupation de l’ancienne maison centrale par le 74ème régiment d’infanterie de Rouen. |
1914 | Le pavillon Colbert est occupé par une batterie du 103ème régiment d’artillerie lourde. |
1915 | Le château abrite, un centre d’instruction des sous-lieutenants auxiliaires de l’infanterie belge, le CISLA 1, jusqu’à la fin de la guerre. |
1919 | Le château devient privé. |
1939 | Le château est réquisitionné par l’état et 400 réfugiés espagnols fuyant le l’Espagne franquiste y sont accueillis. |
1940 | Le château est réquisitionné pour être transformé en stalag (prison militaire) par les occupant allemands. |
1941 | Le château devient un camp d’internement administratif pour le gouvernement de Vichy. |
1944 | 1400 personnes sont internées dans le château en attendant leur jugement. Ce sont principalement : des Collaborateurs, des « Profiteurs », des Travailleurs volontaires en Allemagne, des Délateurs, des Miliciens, des Engagés volontaires dans l’armée allemande. |
1945 | Le château est acheté par un particulier qui fait démolir un grand bâtiment et fait paraître une petite annonce « à vendre, boiseries, sculptures… ». |
La Maison Centrale (1812 – 1901)
Les Jardins Hauts du château accueillent un centre pour condamnés aliénés puis un centre correctionnel
1866 | L’administration pénitentiaire envisage dès 1866 de transformer l’annexe des mineurs en centre destiné aux hommes condamnés aliénés ou épileptiques. |
1869 | Les travaux commencent. |
1876 | Le centre est inauguré. L’annexe spéciale de Gaillon accueillera jusqu’à une centaines de détenus les premières années. |
1906 | Le centre des prisonniers aliénés est fermé définitivement. Il n’en reste aujourd’hui que la « Maison Grise ». |
1908 | La décision est donc prise d’aménager une colonie correctionnelle de mineurs dans les bâtiments de l’ancien asile pénitentiaire. Le accueillera jusqu’à 200 mineurs. |
1915 | Le centre est fermé provisoirement pendant la guerre pour accueillir des prisonniers militaires. |
1920 | La colonie rouvre brièvement. |
1921 | Le centre ferme définitivement. |
Asile des prisonniers aliénés de Gaillon (1876 – 1921)
Le château est restauré
1970 | L’état rachète le château par expropriation. Une longue procédure judiciaire s’en suit. |
1975 | L’acquisition du château est officialisée. Georges Duval, architecte en chef des monuments historiques, commence une étude pour la restauration de l’édifice. |
1977 | Les travaux de restauration commencent. C’est environ 350.000 euros qui sont été consacrés chaque année à la réhabilitation du château depuis cette date. Se référer à 🔗« Le dire de l’architecte des bâtiments de France, Les essentiels N°11 – Historique du château de Gaillon : la construction du château » par France Poulain en 2019 pour le détail des travaux de restauration. |
Premiers travaux d’urgence
Le projet de rénovation du château par l’Agglo Seine-Eure
A partir de 2021, 🔗 l’Agglo Seine-Eure envisage une refonte complète du site pour un coût total estimé à 45 millions d’euros.
La première tranche des travaux est commencée. Elle concerne la rénovation du pavillon d’entrée et l’accueil du château.
La tranche suivante concernera la chapelle et les anciennes cuisines de la Grant Maison. Le rez-de-chaussée accueillera, en plus de la chapelle, une vaste salle de réception qui aura pour vocation d’accueillir des séminaires ou des rencontres culturelles. Des espaces de congrès seront créés pour réhabiliter les deux étages supérieurs. Les anciennes cuisines seront également réhabilitées. Un ascenseur sera créé ainsi que des toilettes à chaque étage. Un musée sera crée sous la la chapelle pour mettre en valeur les objets stockés dans le dépôt lapidaire.
La tranche suivante permettra d’accueillir le conservatoire de musique dans l’aile ouest et un auditorium dans l’aile nord du château.
La tranche suivante concernera le Prieuré et le bâtiment situé à côté du châtelet d’entrée pour accueillir dans le premier un pôle d’artisanat spécialisé dans la restauration de monuments historiques et dans le second un salon de thé et des bureaux.
La dernière tranche verra la réhabilitation de la « Maison Grise » en hébergement touristique et la restauration du pavillon Colbert au devenir indéterminé.